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Pratiques ESG & réglementations : où en sont les différents acteurs ?

baromètre de l'immobilier responsable, OID

Nous avons récemment échangé avec Alexandre Van Ooteghem, responsable pôle finance responsable à l’Observatoire de l’Immobilier Durable (OID), afin de revenir sur l’intégration des exigences réglementaires en lien avec la durabilité.

Nous sommes notamment revenus sur le Baromètre de l’Immobilier Responsable (BIR), publié fin 2024.


En voici un résumé :

Propos recueillis par Marion DUBOIS


Contexte


>> Pouvez-vous présenter brièvement le Baromètre de l'Immobilier Responsable (BIR) et ses objectifs ?

Lancé en 2018, le Baromètre de l’Immobilier Responsable (BIR) a publié sa 7e édition fin 2024.

Il mesure le niveau de maturité des acteurs de l’immobilier en termes de pratiques ESG (Environnementale, Sociale et de Gouvernance) en s’appuyant notamment sur une matrice de 20 enjeux clés.


Le BIR analyse la manière dont les acteurs adoptent et déploient les indicateurs ESG, et évalue leur degré d’intégration de ces enjeux dans leur gouvernance et leur stratégie.

6 typologies d’acteurs y sont représentés : sociétés de gestion de portefeuille, foncières, investisseurs institutionnels, bailleurs sociaux, financeurs et promoteurs immobiliers.


L’objectif du baromètre est ainsi de suivre l’évolution des pratiques ESG et de comprendre comment chaque typologie d’acteurs s’approprie ces enjeux en fonction de leurs spécificités.



>> Quels sont les principaux enseignements de cette édition, notamment en lien avec les réglementations ?

  • Une pression réglementaire structurante

La transformation du marché immobilier est largement impulsée par la pression réglementaire. Une forte corrélation est observée entre la nature coercitive des réglementations et leur impact sur l’évolution des pratiques.


  • Un enjeu d’appropriation et de mise en oeuvre

Malgré un secteur en phase ou en avance sur le marché, les acteurs font face à une difficulté majeure : le temps nécessaire pour s’approprier pleinement les réglementations et en exploiter le potentiel au-delà d’une simple obligation de reporting.


  • Des défis d’application selon les typologies d’acteurs

Tous les acteurs ne sont pas impactés de la même manière. La proximité avec l’actif immobilier conditionne la capacité d’adaptation. Certains peinent à appliquer les règles non par manque d’engagement, mais faute de clarté dans les définitions réglementaires.


  • Un besoin de stabilisation et d’accompagnement

Le marché entre dans une phase de stabilisation où la maturité des acteurs se renforce progressivement. Cependant, pour éviter que la réglementation ne soit perçue uniquement comme une contrainte administrative, il est essentiel de laisser du temps aux acteurs pour l’intégrer et l’opérationnaliser.

L’enjeu est de trouver un équilibre entre ambition réglementaire et faisabilité terrain, afin que les dispositifs de durabilité puissent être réellement efficaces.



Enjeux climatiques, énergétiques et carbone


>> Où en est aujourd'hui le secteur immobilier tertiaire dans sa trajectoire de décarbonation ?

La dynamique de décarbonation dépend fortement du type d’actifs et de leur phase de vie :

  • en construction : l’enjeu porte sur la conception bas-carbone, l’usage de matériaux à faible impact et l’optimisation énergétique dès la conception

  • en exploitation : la réduction de l’empreinte carbone repose sur l’optimisation des usages et l’amélioration des performances énergétiques


Les bureaux sont “plus avancés” grâce à une meilleure maîtrise des données et une capacité à optimiser les usages du bâti.

En revanche, des actifs comme les commerces ou le résidentiel locatif, sont plus complexes à adapter, en raison de la multiplicité des parties prenantes.



>> Quelles sont les principaux défis identifiés ?

  • Priorisation des actions selon le potentiel des actifs

Certains bâtiments sont plus faciles à optimiser que d’autres (ex. commerces ouverts sur l’extérieur en permanence). Il est essentiel d’identifier les actifs à fort levier d’action et de concentrer les efforts là où les gains sont les plus significatifs.


  • Réglementations et dispositifs d’accompagnement

Les efforts sont particulièrement concentrés sur le carbone et l’énergie qui bénéficient d’une maturité réglementaire et de dispositifs d’accompagnement nationaux. Ces domaines sont bien maîtrisés car les métriques sont claires et quantifiables.

En revanche, des sujets comme la biodiversité et l’eau sont plus difficiles à intégrer car leurs bénéfices réels restent à démontrer pour certains acteurs. Il est nécessaire de mieux structurer les études d’impact afin de justifier l’investissement dans ces domaines.


  • Arbitrage entre adaptation et rentabilité

Comment adapter les bâtiments sans impacter leur rentabilité ? C’est une question clé pour de nombreux investisseurs. Il y a un équilibre à trouver entre résilience et performance financière.



>> Quelles solutions et leviers d'actions pour accélérer la transition ?

  • Améliorer la collecte et l’exploitation des données


  • Expérimenter et tester des solutions innovantes : encourager les acteurs à tester des approches (biodiversité, adaptation, nouvelles normes énergétiques…) pour mesurer leur impact concret et affiner les stratégies.


  • Clarifier le cadre réglementaire pour lever les freins à la mise en oeuvre.


  • Accompagner l’appropriation des réglementations : la pression réglementaire est perçue comme un moteur, mais aussi comme un risque de saturation. Laisser du temps à l’appropriation est essentiel pour éviter que ces obligations ne soient vues uniquement sous l’angle de reporting.



>> Le Baromètre met en avant l’importance de la résilience des actifs face aux aléas climatiques. Comment les acteurs évaluent-ils la vulnérabilité de leurs actifs face aux aléas climatiques ?

Les acteurs de l'immobilier prennent de plus en plus conscience de la vulnérabilité de leurs actifs face aux risques climatiques, cependant l'intégration de ces risques dans les stratégies financières reste un défi. La fiabilité des données et l'évaluation précise des risques physiques sont des obstacles majeurs.


Si des matrices de risques climatiques existent, elles ne sont pas toujours intégrées aux enjeux financiers. Pour une gestion efficace et adaptée, il est essentiel de disposer de modèles robustes reliant vulnérabilités physiques des bâtiments, outils de diagnostic et impacts économiques afin de faciliter des décisions éclairées et durables.



>> Quelles sont les solutions envisagées pour renforcer la résilience des bâtiments ?

Plusieurs leviers sont explorés pour améliorer la résilience des bâtiments, notamment :

  • Améliorer les outils d’évaluation des risques pour traduire les risques physiques en impacts financiers

  • Intégrer la résilience climatique dans la stratégie d’investissement afin de la considérer comme un investissement à long terme plutôt qu’une contrainte

  • Passer de l’évaluation à l’action pour garantir l’applicabilité des solutions mises en place



Réglementations et adaptation des acteurs


>> En quoi les réglementations influencent-elles les stratégies ESG des acteurs ?

Les réglementations ont un impact qui varie selon les typologies d’acteurs. Elles ne sont pas seulement une contrainte, elles structurent aussi la prise de décision.

  • Pour les investisseurs et financiers : ils doivent intégrer des critères ESG dès la due diligence et peuvent bénéficier de co-financements avantageux.


  • Pour les propriétaires et bailleurs : les réglementations aident à structurer les priorisations des investissements (quels bâtiments rénover en priorité pour maximiser l’impact environnemental et social). Les bailleurs sociaux, en particulier, ne se limite pas à l’environnement mais inclut aussi des enjeux de bien être et de qualité de vie des occupants.


  • Pour les gestionnaires et opérateurs : ils doivent veiller à la rentabilité des travaux sur le long terme et s’assurer de la pertinence des travaux face aux événements climatiques à venir dont nous n’avons pas la main.


Tous doivent trouver le bon équilibre entre travaux et rentabilité, une équation d’autant plus complexe dans un marché en mutation, notamment pour les biens non premium (triangle d’or…).



Collecte des données et sensibilisation


>> Quels sont les principaux obstacles rencontrés dans la collecte des données, notamment avec la multiplicité des acteurs impliqués ?

Les property Manager occupent une position centrale : en contact direct avec les bâtiments et leurs occupants, ils assurent le suivi opérationnel, mais leur rôle dans la collecte des données peut être sensiblement limité. Pourtant lorsqu’un bien n’est pas géré directement par son propriétaire, ce sont eux qui détiennent une grande partie des informations.

Une question demeure, qui, au final, possède une vision complète et fiable du bien sous gestion ?


Du bâtiment au reporting, la chaîne est composée de multiples intervenants. La fiabilité des données peut être compromise. Peu de baux incitent les locataires à partager leurs informations .


Les acteurs manquent parfois de référentiels clairs sur les indicateurs ESG prioritaires et les bonnes pratiques de collecte.

Plus il y a d’intermédiaires, plus le risque de données partielles, erronées ou non homogènes augmente.


Les acteurs expriment un besoin croissant d’outils robustes capables de traiter la grande volumétrie des données et de limiter les risques opérationnels. La gestion des données ne peut pas être uniquement technologique, elle nécessite des équipes dédiées capables d’assurer la coordination entre les différents acteurs.



>> Quelles solutions pour améliorer la collecte des données ESG ?

Mieux intégrer les property manager dans la stratégie ESG en les incitant à collecter et remonter des données de qualité.

Automatiser autant que possible pour réduire les erreurs et le travail manuel.

Renforcer la formation et la sensibilisation des différents acteurs sur l’importance de la qualité des données.

Affecter des ressources humaines dédiées à la gestion des données ESG pour un suivi efficace et stratégique.


La collecte des données ESG ne repose pas seulement sur la technologie et les outils mais aussi sur un alignement des acteurs, une gouvernance claire et une prise de conscience des enjeux.




Pour durer, il faut perdurer. La transition vers un immobilier responsable ne peut être une simple réponse aux contraintes réglementaires ou aux tendances du moment. Il est essentiel de ne pas casser les dynamiques en cours et de laisser du temps aux acteurs de s’approprier la transformation, car sans appropriation, il n’y a pas d’impact durable.


Un bâtiment n’existe pas pour être simplement performant, il doit être robuste. La robustesse, c’est la capacité à encaisser les chocs, évoluer avec le temps et s’adapter aux usages futurs. Plus qu’un impératif, c’est une philosophie de long terme, où la construction et la gestion immobilière ne sont pas pensées comme des réponses immédiates à une norme, mais comme des structures capables de traverser des décennies, en s’adaptant aux enjeux environnementaux et sociétaux à venir.


L’avenir du secteur repose sur un équilibre entre performance et robustesse : innover sans précipiter, structurer sans rigidifier et faire de la transition un récit collectif pérenne qui place l’humain au cœur de la transformation.



 

Pour aller plus loin


Edition 2024 du Baromètre de l'Immobilier Responsable


A propos de l'OID

Association indépendante, l’Observatoire de l’Immobilier Durable (OID) a pour but d’accélérer la transition écologique du secteur de l’immobilier en France et à l’international. Composée de plus d’une centaine d’adhérents et partenaires parmi lesquels les leaders de l’immobilier, l’OID constitue la référence pour toute la chaîne de valeur du secteur, et promeut l’intelligence collective pour résoudre les problématiques environnementales, sociales et sociétales de l’immobilier. L’OID produit des ressources et outils au service de l’intérêt général.


 

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